Le blog va se mettre un peu en repos. Mais rassurez-vous. Viendra le temps d’une grande série où l’on vous parlera encore des Juifs, beaucoup de la ligne de démarcation, des passeurs, du devenir des Juifs une fois la ligne de démarcation franchie, etc. etc. Mais pour cela, il faut dépouiller les volumineux dossiers des archives départementales. Car la vérité ne se trouve pas dans les on-dit. Pour preuve encore, l’incroyable histoire du commissaire Escude (écrit également Escudé) de Tournus, racontée et souvent enjolivée par les uns et par les autres.
Qui était le commissaire Escude ?
Le nom du commissaire Escude figure sur le monument aux morts de Tournus. Il a même reçu une médaille. Et pour cause : il a été déporté le 28 juillet 1944 depuis Compiègne à Neuengamme, affecté au kommando de travail forcé à Stöecken. Escude n’est pas revenu.
André Pierre Jean est né à Bordeaux le 21 mai 1916. En 1942, il exerce à Lyon comme commissaire de police stagiaire mais il est suspendu provisoirement de ses fonctions sans que l’on sache pourquoi. Il est réintégré en mars 1942 et nommé à Tournus, révoqué le 1er mars 1943 après son arrestation qui a eu lieu le 25 janvier de la même année.
Versions made in Saône-et-Loire de Jeannet et de Gillot-Voisin
Si l’on en croit l’historien local André Jeannet[1], Escude fut arrêté car il avait stocké des armes (1er bon point) et parce qu’il avait aidé des Juifs (2e bon point)[2]. Escude devenait un personnage intéressant pour ClunyHistoired’histoires et on a donc creusé un peu plus loin. Car c’est pas courant les gens qui aident les Juifs, surtout un « commissaire ». Allait-on à la fin de l’enquête lui donner d’autres bons points et enfin une image ?
Poursuivant les lectures du cru, nous mettons le nez dans le « La Saône-et-Loire sous Hitler. Périls et violences » de Jeanne Gillot-Voisin, publié en 1996. Jeannet ne fait pas mention sept ans plus tard de ce que sa collègue a précédemment écrit. Une petite phrase passe presque inaperçue mais elle nous titille :
« Ainsi Henri Lafont, dit « Monsieur Henri », chef de la « Gestapo française » (…) « descend » à Tournus pour rétablir, au commissariat du bourg, une « morale » plus conforme aux règles du milieu… ». J. Gillot-Voisin.
J. Gillot-Voisin n’en dit cependant pas plus. Il ne faudrait pas « entacher » l’histoire de la résistance.
Diantre. L’histoire d’Escude devient de plus en plus passionnante. Que s’est-il donc passé à Tournus en janvier 1943 pour que « Monsieur Henri » descende de Paris ? Là, il va falloir faire parler les archives et croiser les sources.
Mais avant de partir à Tournus, vous reprendrez bien un peu de la Carlingue, histoire de vous rafraîchir la mémoire avec cet excellent documentaire ?
À suivre…
[1] Jeannet André. La Seconde guerre mondiale en Saône-et-Loire: occupation et résistance. Mâcon, JPM éditions, 2003, 350 p., p. 281.
[2] L’histoire relatée ainsi par Jeannet est recopiée texto par Limore Yagil dans son Désobéir : Des policiers et des gendarmes sous l’occupation, 1940-1944. Elle ne prend pas la peine, comme bien souvent, de vérifier ses sources.