Après le 13 août
Sept Juifs ont été arrêtés. Puis tués. Leurs épouses et leurs enfants les ont suivis à Montluc. Ces derniers ne doivent leur survie qu’à la libération de la prison le 24 août. Néanmoins, Berthe Lion décédera à la suite de son internement. Comme l’écrivait Marcel Vitte, c’étaient des « résidents étrangers ou reconnus comme Juifs ». Certes. Des résidents « étrangers » qui vivaient à Mâcon depuis quatre ans pour certains. Des Juifs français et étrangers. Des gamins de 16 ou 17 ans, une balle dans la nuque et recouverts à peine d’une pelletée de terre.
Vitte parlait d’une trentaine d’hommes emmenés à Lyon. Certains ont été libérés mais qui sont les autres ? En l’état actuel de nos recherches nous n’en savons rien. Mais ce que nous pouvons dire, c’est que la répression des « vaincus », Allemands et milice, ne s’arrêtera pas là. Dans les jours qui suivent la rafle du 13 août, les vaincus de la bataille de Cluny embarquent de jeunes résistants mâconnais. Ils ne seront pas tués à Bron mais dans les caves de la Gestapo place Bellecour.
Jacques Farinetti (18 ans)[1], Marcel Humbert (16 ans)[2] et Paul Roy (16 ans)[3] furent arrêtés à Mâcon entre le 12 et le 17 août 1944[4], suite à la dénonciation de René Gruel un de leurs condisciples de 19 ans, jeune franc-garde mâconnais. Le milicien était déjà impliqué dans la tuerie qui eût lieu à Mâcon le 28 juin 1944.
Un autre de leurs camarades, Marcel Gidon (1927-1944)[5] a également été arrêté le 16 août à Mâcon, en possession de tracts.
Jean-Sébastien Chorin qui a rédigé la notice « Lyon (Rhône), place Bellecour, 23 août 1944 » pour le Maitron en ligne, complète les informations données par Marcel Vitte : deux autres résistants furent également arrêtés : Antoine Chazal et Jean Brize[6].
Les résistants sont enfermés et torturés dans les locaux de la Milice, au 9 quai Lamartine puis à la caserne Bréart. Ils sont ensuite transférés à Lyon le 22 août[7] et descendus dans les caves du siège de la Gestapo place Bellecour[8].

À 17 heures, ce 23 août, tous ces hommes sont rassemblés dans le hall et sont rejoints par quatre prisonniers juifs[9]. On leur demande alors à tous s’ils sont Juifs ou résistants. « Seuls Jean Brize, Paul Roy et Jean Chassagnette restèrent immobiles[10]. » Les prisonniers juifs sont exécutés en premier, dans les caves de la Gestapo. Puis c’est au tour des résistants. On ne retrouvera jamais leurs cadavres.
Les trois rescapés (Brize, Roy et Chassagnette) furent ensuite libérés.
Paul Roy verra ainsi assassinés sous ses yeux ses camarades Farinetti, Gidon et Humbert. Il « en sera [écrit Marcel Vitte] marqué à vie et ne pourra le supporter. Il se pendra quelques années plus tard. »
La ville de Mâcon sera libérée le 4 septembre. Mais, jusqu’au bout, ne l’oublions pas, l’occupant et la milice auront fait payer cher la bataille du 11 août.
[1] Jacques René François FARINETTI est né le 9 juillet 1926 à Bourg-de-Thizy. Il travaillait à la préfecture de Mâcon comme auxiliaire. Il appartenait au réseau Marc Breton.
[2] Marcel André HUMBERT est né le 24 juin 1928 à Mâcon. Il était lycéen et agent du réseau Marc Breton.
[3] Paul Adrien ROY est né le 3 février 1928 à Mâcon. Il appartenait au mouvement Combat.
[4] Marcel Humbert a été arrêté le 15, Paul Roy le 17.
[5] Vitte, Marcel. Chroniques de Thibon. Mâcon : Imprimerie Buguet-Comptour, 2000, 103 p., p. 87. Marcel Auguste GIDON est né le 12 septembre 1927 à Saint-Martin-de-Fugères (Haute-Loire). Il était lycéen et était agent du réseau Marc-Breton depuis avril 1942.
[6] http://maitron-fusilles-40-44.univ-paris1.fr/spip.php?article201274
[7] Part également avec eux Delettre, originaire de Thoissey. Il est également assassiné le 23 août.
[8] Jean Chassagnette les rejoint dans leur cellule le 23 août.
[9] L’identité de trois personnes n’est pas connue. On suppose que la quatrième était Isaac Bensignor. http://maitron-fusilles-40-44.univ-paris1.fr/spip.php?article201906
[10] http://maitron-fusilles-40-44.univ-paris1.fr/spip.php?article201274