17 JUIL. 2021
PAR ALBERT HERSZKOWICZ
La commémoration de la rafle du Vel’ d’Hiv’ se déroule dans un contexte nauséabond. La pandémie du Covid donne lieu à une déferlante de propagande antisémite. Des étoiles jaunes sont brandies. Les partisans de Philippot sont au premier rang de cette manipulation qui banalise le génocide des Juifs. Ils réussissent à entraîner des récidivistes comme François Ruffin
Ainsi le 15 mai dernier, les partisans de Philippot se rassemblaient à Orléans, arborant des étoiles jaunes et une banderole « Liberté » (voir ci-dessous)
Le chef des » Patriotes » organise d’ailleurs une manifestation de « liberté » le samedi 17 juillet, à la date du deuxième jour de la rafle de 1942.
On ne peut qu’être choqué et horrifié par l’appel de Fançois Ruffin, député LFI, coutumier des propos confusionnistes à se joindre « aux manifestations » de ce type. Il avait déjà congratulé le négationniste antisémite Étienne Chouard.
Le Figaro peut ainsi titrer : « Ruffin, Philippot, Dupont-Aignan et Asselineau appellent à manifester contre le passe sanitaire »
Or durant la campagne présidentielle de 2017, ce même Philippot, alors numéro du RN et porte-parole de Marine Le Pen, avait délibérément lancé une polémique contre la reconnaissance historique le 16 juillet 1995 par Chirac de la responsabilité des autorités françaises dans cette rafle et dans la déportation des Juifs de France.
Par un grossier tour de passe-passe, il évitait de condamner Pétain et le régime de Vichy, afin selon lui de préserver » la fierté de la France » Il déclarait ainsi: « On peut être fier de l’histoire de France », a commencé le soutien de la candidate (Philippot), en dénonçant la repentance de certains dirigeants. Une journaliste lui demande alors s’il pense que le discours de Jacques Chirac en était. « J’ai toujours été dans la position traditionnelle de la France à savoir que la France était à Londres. Je reste fidèle à cette histoire », a répondu Florian Philippot.
« Le responsabilité de l’État français dans la Collaboration n’est pas un fait historique? », le relance alors un journaliste. « La responsabilité de Français oui. De L’état français, non. Je mets la France et la République à Londres », conclut le conseiller de Marine Le Pen.
Marine Le Pen avait ensuite emboité le pas, en déclarant à deux semaines du premier tour de la présidentielle : « Je pense que la France n’est pas responsable du Vél’ d’Hiv’ ». Il s’agissait manifestement d’un choix stratégique, car elle redoublait ainsi le propos de Philippot
Dans l’émission « Le Grand Jury RTL-LeFigaro-LCI » du 9 avril, le journaliste Olivier Mazerolle l’avait interrogée sur son programme prônant « la promotion du roman national et le refus de repentance ». Il lui avait demandé si Jacques Chirac avait eu tort de prononcer son discours de 1995 sur le Vél’ d’Hiv, dans lequel il avait reconnu la responsabilité de la France. « Je pense que la France n’est pas responsable du Vél d’Hiv‘ », a-t-elle répondu, se plaçant ainsi en opposition à cette reconnaissance.
La justification de la chef frontiste se dévoila ensuite, lorsqu’elle poursuivit dans une argumentation manifestement reprise des propos de Philippot: « … La France a été malmenée dans les esprits depuis des années. En réalité, on a appris à nos enfants qu’ils avaient toutes les raisons de la critiquer. De n’en voir que peut-être que les aspects historiques les plus sombres. Je veux qu’ils soient à nouveau fiers d’être Français. »
La diatribe de la chef frontiste avait fait ressurgir en pleine lumière non seulement la continuité antisémite du FN mais également l’histoire originelle de ce parti, dont nombre de fondateurs étaient issus de la collaboration avec les nazis.
Nous condamnons également la reprise par Jean-Luc Mélenchon d’une argumentation proche de celle de ces duettistes. Réagissant aux propos de Marine Le Pen, il avait estimé dans un premier temps que ce qu’elle avait dit « déclench[ait] des polémiques absolument inutiles. L’Histoire de France a fait que les présidents successifs ont fait évolué la question et le regard que l’on portait dessus. » « Pourquoi rallume-t-elle cette querelle ? Pour blesser ? », se demandait-il alors . « Le président Chirac a dit une fois une chose (discours de 1995). Tâchons de nous tenir à une continuité dans notre regard sur l’histoire. » « Sur cette affaire, il devient très difficile de dire que personne n’y est pour rien, alors que c’est la police française qui a organisé la rafle (…) Ça blesse, ça crée une polémique inutile.» « La République française n’est pas coupable mais la France l’est », notait-il. » Donc une réaction certes modérée à l’égard de la cheffe frontiste, mais clairement dans l’esprit du discours de Chirac en 1995.
Mais quelques semaines plus tard, à l’occasion de la commémoration du 75e anniversaire de la même rafle, le chef de la LFI disait exactement l’inverse et se retrouvait ainsi aux côtés du FN ainsi que de Sarkozy, pourfendeur de la repentance française y compris à l’égard de la Shoah.
Mélenchon écrivait alors : « Après cela, déclarer que la France est responsable de la rafle du Vel d’Hiv’ est là encore un franchissement de seuil d’une intensité maximale. Mais dire que la France, en tant que peuple, en tant que nation est responsable de ce crime c’est admettre une définition essentialiste de notre pays totalement inacceptable… » . Jamais, à aucun moment, les Français n’ont fait le choix du meurtre et du crime antisémite ! Ceux qui ne sont pas juifs ne sont pas tous, globalement et en tant que Français, coupables du crime qui a été commis à ce moment-là ! Tout au contraire, par sa résistance, ses combats contre l’envahisseur et par le rétablissement de la République dès que celui-ci a été chassé du territoire, le peuple français a prouvé de quel côté il était réellement. Il n’est pas au pouvoir de Monsieur Macron d’assigner tous les Français à une identité de bourreau qui n’est pas la leur ! Non, non, Vichy ce n’est pas la France ! »
Mélenchon choisissait au passage de déformer les propos de Macron. Ce dernier n’avait fait qu’actualiser le discours de Chirac en 1995, en y introduisant une référence évidente à Marine Le Pen et en rappelant de la IIIe République était déjà ravagée par le racisme et l’antisémitisme, notamment lors des émeutes fascistes de 1934 et lors de l’accession au pouvoir du Front Populaire et de Léon Blum.
Macron mettait en valeur le rôle des résistants les plus précoces, en les opposant à ceux qui collaboraient avec les nazis. Il était bien loin d’ »assigner tous (!) les Français à une identité de bourreau » comme Jean-Luc Mélenchon ( JLM) faisaitt semblant de le croire. Au passage, ce dernier semblait impliquer que contrairement aux Français, d’autres populations auraient « fait le choix du meurtre et du crime antisémite ». Il s’agit d’une allusion assez limpide à l’Allemagne et au prétendu vote majoritaire pour les nazis en 1933.
En se positionnant ainsi, le chef de la LFI se plaçait, une fois de plus, dans le sillage de celui qu’il présente comme son inspirateur et modèle politique, c’est à dire François Mitterrand. Il reprenait d’ailleurs quasiment mot pour mot les termes que ce dernier utilisait afin de minimiser les responsabilités françaises dans la responsabilité des autorités françaises, au prix d’arguties juridiques de mauvaise foi.
Car Mitterrand n’a pas du tout été « mutique » à propos de la rafle du Vel d’Hiv’ et plus généralement à propos de la persécution des Juifs sous Vichy , contrairement à ce que Macron a choisi de dire diplomatiquement lors de son discours . Au contraire, il a maintes fois marqué son inclinaison pour l’ambiguïté, le mensonge, et la dissimulation en la matière.
On connait notamment son amitié et sa complicité maintenues pendant de très longues années avec René Bousquet, chef suprême de la police de Vichy et signataire des accords dits « Bousquet-Oberg » (général SS, chef supérieur de la SS et de la police en zone occupée) établissant la déportation des Juifs et la place centrale de la police française dans ce processus. Bousquet est l’organisateur de la rafle du Vel’ d’Hiv’ ainsi que de celle de Marseille en 1943 .
Le sachant parfaitement, Mitterrand agira afin de retarder le procès qui doit enfin s’ouvrir contre son ami Bousquet au milieu des années 1980. C’est ce qu’établissent les juristes de la mission de la FIDH qui font savoir que « il y a une décision politique au plus haut niveau de ne pas faire avancer l’affaire Bousquet ». Après une nouvelle plainte pour crimes contre l’Humanité déposée contre lui en 1989, Bousquet comme beaucoup d’autre bourreaux ne sera jamais jugé, car il est assassiné en 1991.
Mais il y a un autre fait: chaque 11 novembre, de 1987 à 1992, Mitterrand alors président de la République, a fait déposer une gerbe de fleurs présidentielle sur la tombe du Maréchal Pétain, à l’île d’Yeu, au prétexte du rôle de ce dernier lors la première guerre mondiale
Les associations de résistants et de victimes du nazisme avaient beau protester unanimement, rien n’y faisait. En 1992 le scandale fut plus important … lire la suite ici http://info-antiraciste.blogspot.com/2021/07/shoah-etoile-jaune-rafle-du-vel-dhiv.html