Au début du XXe siècle, pas de télévision, pas de téléphone portable et pas de confinement. Mais, à en croire la presse de l’époque, il existe mult occasions à Cluny, pour partager des moments de convivialité. Comment étaient organisées ces fêtes, qui en était l’initiateur et quels étaient les participants ?

Intéressons-nous aujourd’hui à la « fête des Écoles ».

À l’origine de cette fête, un homme : Pierre Dameron, alors directeur de l’École pratique de Commerce et d’Industrie installée sur la colline du Fouettin.

Très rapidement, Dameron décide d’adhérer à la Ligue de l’enseignement[1]. Cela procurera des avantages à son établissement : des livres pour la bibliothèque de l’École, acquis à moindre frais, et la possibilité d’inviter des conférenciers à Cluny. Les instituteurs de la cité abbatiale rejoignent eux-aussi la Ligue.

Le « Cercle des dames »

À la Ligue de l’enseignement se greffe rapidement « un cercle des Dames ». Elles seront chargées, en outre, de confectionner des vêtements, robes, tabliers, tricots, pantalons, remis aux élèves nécessiteux. En 1939, le Cercle des dames existe toujours. Il reçoit une subvention de 1000 francs du conseil municipal « pour achat de matières premières afin de confectionner des vêtements chauds à l’usage des mobilisés ainsi qu’à leurs familles. » En mai 1940, leur subvention s’élèvera à 5000 francs.

Instaurer une « fête des écoles »

La ligue clunisoise prospère et, écrit Dameron, « de grosses ambitions nous étaient venues. Nous avions créé la Fête des Écoles ». Celle-ci avait été décrétée par la Ligue de l’enseignement de Paris et chaque section de province pouvait l’organiser à sa guise[2].

La Ligue de Cluny n’avait pas d’argent, ou si peu. Peu importe. Les établissements scolaires fabriquèrent des chars et autos fleuris, pour transporter les plus jeunes enfants. « L’École des Arts-et-Métiers avait construit une chaloupe fleurie, merveilleuse vraiment, avec toutes les jeunes têtes blondes et brunes émergeant de ses bords. » Les Clunisois, propriétaires de voitures ou de camions, n’avaient pas lésiné à la tâche et s’étaient volontiers associés à cette initiative qui mettait de la vie et de la convivialité dans la cité.

En 1904, lors de la première manifestation, quatre cents enfants et leurs enseignant-e-s défilèrent en passant par la Porte de Mâcon, la place du marché pour arriver au Fouettin. En tête, la fanfare de l’École pratique, suivie par la « Société philarmonique ».

Sur le Fouettin, des chevaux de bois, un théâtre de Guignol et des balançoires furent installés. Le goûter eut lieu aux Quinconces avec danses, rondes et jeux divers. Pour les enfants, on servit des brioches, des cerises et du vin rouge additionné bien sûr d’un peu d’eau !

Puis la soirée commença avec un bal en plein air. Le Fouettin fut illuminé sur toute la promenade avec des lanternes vénitiennes dans les arbres… La belle allée du Fouettin, jusqu’au milieu du XXe siècle, fut toujours le théâtre de manifestations. Mais bon, les temps changent et il a aujourd’hui une toute autre utilité…

1935, défilé pour la fête de la gymnastique

La première fête des écoles se termina avec une bataille de confettis. Les plus petits rentrèrent à la maison tandis que les Prat’siens avaient eu la permission de minuit. Quant aux adultes, pour eux « le vent soufflait un peu à la folie, les gens les plus sérieux y allaient de leur petite polka. »

Rassemblant de nombreux Clunisois, « la fête des Écoles » de Dameron fut un véritable succès. Son initiative est encore signalée par Nadine Roiné dans les années 1935 : la fête des écoles avait lieu le 14 juillet.


[1] La fondation de la ligue française de l’enseignement a inspiré les lois sur l’école « gratuite, obligatoire et laïque » à la fin du XIXe siècle. En 1931, Nadine Roiné auteure de « Au Pays de Cluny », note que les Clunisois fêtèrent également le cinquantenaire de l’école laïque.

[2] Dameron Pierre. La vie d’une école. Cluny : Dutrion, 1926, 226 p., p. 49 et suivantes.