La fanfare à Dameron

À l’ouverture de l’École primaire supérieure installée dans la salle de Justice de Paix en 1893, Pierre Dameron a treize élèves[1].

Il ira donc acheter à crédit treize instruments de musique chez M. Ducôté : basse, cornet à pistons, alto, baryton, trombone… Ce monsieur Ducôté tient le magasin d’horlogerie, bijouterie, orfèvrerie et optique, à l’angle de la rue Municipale. Ducôté est délégué des membres honoraires de la société de Chorale et d’Harmonie de Cluny.

Dameron donne à ses élèves une leçon de musique pendant une demi-heure chaque jour. Comme dans l’enseignement secondaire spécial, la formation de l’élève doit être complète et ne doit pas négliger les arts. La musique, le chant, sont des excellents compléments d’éducation afin que les élèves prennent de l’assurance et se débarrassent, pour certains, de leur « gaucherie ». De surcroît, pense Dameron, les enfants des « classes laborieuses » de l’enseignement primaire supérieur, ont le droit de faire leurs « débuts dans le monde », comme leurs « camarades fortunés ».

Dameron a besoin de faire sa publicité s’il souhaite attirer de nouveaux élèves. Sa fanfare participera à cet objectif. C’est M. Cognard, instituteur, qui en prend la direction. Il organise ainsi de nombreuses sorties en ville « en musique ». Elle se rend même à pieds jusqu’à Tramayes en faisant une halte à Saint-Point pour que les élèves visitent le tombeau, le château et le parc de Lamartine. Certes, l’omnibus de l’hôtel de Bourgogne suit la joyeuse troupe pour les ramener à bon port en cas de besoin.

Outre les sorties musicales qui doivent mettre de la gaieté en ville, Dameron organise une société chorale. Chaque année, l’école donne « un grand concert vocal et instrumental » avec pièce de comédie.

Se soucier des pauvres

Fondé en l’an V de la République, le Bureau de Bienfaisance avait pour tâches essentielles de secourir pauvres, malades, personnes âgées, enfants abandonnés et orphelins. À Cluny, les formations musicales reverseront souvent les recettes de leurs concerts pour alimenter la caisse du Bureau de bienfaisance.

Comme Kuhn et ses normaliens jouaient pour les déshérités de la ville, Dameron organisera des concerts pour « contribuer au soulagement de grosses misères ». En mars 1895, il remet 282 francs au bureau de bienfaisance qui redistribue cette somme aux pauvres de Cluny « victimes des rigueurs de l’hiver. » « Lors de l’explosion de grisou de 1895, qui fit tant de victimes à Montceau-les-Mines, nous donnâmes un concert en leur faveur. La recette nette dépassa 600 fr. » De son côté, la formation musicale de l’École Nationale d’Ouvriers et de Contremaîtres fait de même : avec une recette de 564 francs, ils reversent la moitié aux sinistrés de Montceau-les-Mines et l’autre moitié aux pauvres de Cluny.

À suivre…


[1] Dameron Pierre. La vie d’une école. Cluny : Dutrion, 1926, 226 p., pp. 38-44.