T. Gerbet, maîtresse de Max Payot

Comme « La Lucienne », travailler pour la Gestapo pour sauver son conjoint, voilà l’excuse que Thérèse Gerbet avancera devant ses juges.

T. Gerbet naît le 19 mars 1919 au Havre. Ses parents sont journaliers. En 1940, elle travaille comme serveuse et rencontre Max Payot qui exerce alors la profession de représentant de commerce et trafique dans le marché noir. Après Paris, Chamonix, le couple s’installe à Lyon.

Payot, « le tueur de la Gestapo »

On trouve toujours une bonne raison pour travailler avenue Berthelot : réfractaire au S.T.O, Max Payot a rencontré Rémy Colonel. Ce dernier lui propose d’entrer à la Gestapo.

Rémy Colonel, exécuté par la résistance.

Mais -à l’instar de Doussot qui aurait été adoubé par le résistant Marcel Peck- Payot, soi-disant résistant depuis 1943, reçoit l’appui de l’inspecteur Julien « Champagne » afin de renseigner la résistance. Ni une, ni deux, les portes de l’avenue Berthelot s’ouvrent en grand.

Le 28 décembre 1943, Payot -celui qu’on surnommera à la Libération « Le tueur de la Gestapo »– obtient sa carte de la police allemande. Dès janvier, il s’occupe de ses premières « baignades ». Fin janvier, il intègre la section IV A.

À Lyon, la vie est belle : sa maîtresse Thérèse porte de belles toilettes, le couple emploie une bonne pour s’occuper de leur villa à Vassieux (avec salle de torture personnelle) et de l’appartement au 45 de la rue de la République où ils vivent avec leur petit garçon. Bien entendu, il s’agit d’un bien réquisitionné à une famille de résistants ou de Juifs. Payot est bien payé : 7 000 francs sans compter les commissions reçues à chaque arrestation et les voitures. Payot en possède cinq !

Lorsqu’il faudra s’expliquer sur ce train de vie, le couple Payot n’aura pas froid aux yeux : tout leur argent proviendrait d’un pactole ramassé à la loterie nationale. Payot y aurait gagné 130 000 francs ou -autre version- 500 000 francs avant d’entrer à la Gestapo !

Max Payot : un agent double ?

Le 3 mai 1944, Payot est arrêté par Bayerli et Fulker. On le soupçonne, dira-t-il, d’avoir été un agent double. A-t-il assuré ses arrières comme la plupart de ses collègues en livrant quelques renseignements par-ci, par-là ? Possible puisque cet « acteur de la tuerie de Saint-Genis-Laval[1] » possède, comme Doussot, un dossier d’homologation comme résistant aux archives de Vincennes[2] !!!

Et c’est là que Thérèse intervient auprès de Fritz Hollert pour faire libérer son amant. Mais pour sortir de la geôle de Montluc, c’est du donnant-donnant. Et quoi de plus naturel, n’est-ce-pas, que de trouver un résistant à dénoncer pour que Payot soit libéré ?

Thérèse Gerbet « donnera » à la Gestapo Elizabeth Farge qui héberge au 8 de la rue rue V. Hugo des officiers belges travaillant pour l’I.S. À sa sortie de Montluc, Payot arrêtera lui-même la résistante qui sera déportée à Ravensbrück. C’est le gage qui lui permettra de réintégrer la Gestapo, la section de contre-espionnage et de renseignements avec Lucien Guesdon comme chef.

Il nous faut sauver notre fortune !

Max Payot sera arrêté à la Libération mais il parviendra, comme Doussot, à s’enfuir dans des « conditions mystérieuses ». Il sera retrouvé à Annecy en octobre 1944. Écroué à la prison Saint-Paul et cherchant à prendre la fuite (?), il sera abattu en décembre 1944 à la prison Saint-Paul par un gardien. Quant à Thérèse Gerbet, elle sera condamnée à la peine de travaux forcés à perpétuité et à la dégradation nationale. Elle purgera sa peine en 1945 à Saint-Etienne tandis que leur fils est placé à l’Assistance publique.

Payot n’épargnera pas sa maîtresse puisqu’il avouera non seulement le rôle qu’elle a joué dans sa libération de la prison Montluc, mais également la cache du magot amassé pendant leurs années à la Gestapo. « Il nous faut sauver notre fortune », écrivait Thérèse à son frère. Sur ce coup-là, elle aura eu moins de chance que Doussot et Renée Combe qui avaient réussi à planquer leur magot.

Thérèse Gerbet se mariera tardivement et elle décédera en novembre 1998.

À suivre…


[1] Ruby, Marcel. Lyon et le département du Rhône dans la guerre, 1939-1945. Horvath, 1990, 239 p., p. 132.

[2] Dossier Max Payot : Service historique de la Défense, Vincennes GR 16 P 462135.