Robert Moog, agent K30
Moog est partout ? fin 1943-1944
Entre novembre 1943 et le débarquement allié, Moog s’active pour le Sturmbannführer Hans Josef Kieffer, patron de la sous-section IVE, au 84 avenue Foch à Paris : il aurait eu alors pour mission de constituer un réseau avec un certain Dupuis et un radio nommé Roland. Cela ne l’empêche cependant pas de travailler pour d’autres services. Robert Dubois signalera ainsi en avril 1945 que Moog travaillait pour un service allemand de Reims[1]. Moog est en fait une sorte d’électron libre. Il va, il vient, entre Paris et Lyon, peut-être Reims. Faute des sources, c’est un agent dont le parcours semble, en l’état actuel des recherches, insaisissable.
Moog en Haute-Savoie ?
Néanmoins, une autre source nous renseigne peut-être sur le parcours de Moog : un agent du réseau Groussard, René Devigny, tombé entre les mains de Moog en avril 1943.
Devigny, s’étant évadé de la prison Montluc dans la nuit du 24 au 25 août 1943, arrive à passer en Suisse. Selon lui, entre la fin décembre et début février, Moog, opère avec le SD de Lyon. Barbie aurait lancé à ses trousses les agents qui connaissent le mieux Devigny : Moog Hollert, Heimann[2] et Franzel. Au début du mois de septembre, Moog et Hollert se seraient même rendus à plusieurs reprises en Haute-Savoie dans la famille de Devigny pour tenter de le retrouver. S’ensuit l’arrestation de nombreux agents dans la région d’Annemasse auxquelles Moog et Hollert ne seraient pas étrangers.
Faute de pouvoir vérifier les allégations de Devigny, Lucien Guesdon prend le relais pour nous détailler le parcours de Moog.
Emprisonné à la prison du Cherche-Midi du 1er octobre au 22 décembre 1943, le Gestapiste aurait fait là la connaissance de Moog. Ce dernier -soi-disant- aurait été incarcéré à la suite d’une affaire de faux-policiers à Paris. Moog a-t-il besoin de remplir son bas de laine avec une affaire de « faux policiers » alors qu’il vient de toucher le pactole avec certaines grosses affaires ? Il est permis d’en douter.
Selon Guesdon, Moog descend de Paris à Lyon en décembre 1943. Une liste des agents de la Gestapo a été découverte par hasard dans un appartement occupé par la résistance, rue des Marronniers. Barbie lance ses fins limiers sur la trace de l’agent qui a pu rédiger un tel rapport. Il pense un instant à Doussot mais finalement c’est Multon qui est accusé. On le ramène, manu militari de Marseille, pour l’interroger. Moog, sachant que Multon n’a rien à voir avec cette histoire de liste, descend de Paris pour le disculper[3].
Opération Korporal
À sa sortie de prison, Guesdon avait retrouvé Moog qui lui avait proposé de travailler pour Barbie à Lyon. Guesdon ne se fait pas prier et il rencontre Barbie en février 1944 : venus de Paris, Moog et Saumande sont alors à Lyon pour réaliser une mission avec le SD[4]. Il s’agit d’aller « nettoyer » les maquis de l’Ain. Lorsqu’il y a un gros coup à faire, l’agent Moog est présent.
Le 5 février, Guesdon dit partir avec Barbie, Moog, Saumande, Doussot, Francis André, Desgeorges et Daniel Pozzi dans le Bugey et le Valromey[5]. C’est l’opération « Korporal » regroupant 2 500 soldats. Exécutions, rafles, déportations, maisons incendiées : l’expédition est particulièrement meurtrière à Evosges, Montgriffon, Le Résinan, Saint-Rambert-en-Bugey… Barbie, selon Guesdon, a tué deux ou trois individus lui-même et Moog a incendié une maison « dont les occupants ont été chassés. »
https://vimeo.com/174682925 ferme de la Montagne
Revenu à Lyon après l’attaque de la ferme de la Montagne (soit le 8 février), Guesdon s’en retourne à Paris avec Moog et Saumande. Guesdon sera, dit-il, définitivement engagé par Barbie en mars 1944.
À suivre…
[1] SHD Vincennes, GR 28P P 9 14 155 : Interrogatoire par la BST de Robert Dubois en avril 1945.
[2] Du SD de Grenoble.
[3] Gelin Jacques. L’affaire Jean Moulin…, op.cit., p. 70. Multon a été interrogé par la DST à ce sujet.
[4] 5 décembre 1944. PV de l’audition de Guesdon par le Commissaire Brignol et audition de Guesdon du 25 novembre 1944. Guesdon évoque également l’affaire « Renée Lilac », agent de liaison à la Croix-Rousse ?
[5] http://www.memoire-deportation-ain.fr/f%C3%A9vrier-1944.aspx