Georges Antoine Novat est né à Vienne (Isère) le 17 juillet 1921. Sa famille vit au 8 de la rue Poète Martial. Son père, Jean (1894-1983), a été tourneur dans une usine de constructions métalliques et, au retour de la guerre, il fonde sa propre entreprise de fabrication de matériel de papeterie et de produits chimiques.
En octobre 1939, Georges a dix-huit ans et il intègre La Prat’s. Il y reste deux ans et retourne à Vienne en juillet 1941.
Compagnon de lutte d’Alban-Vistel
Très rapidement, Georges -comme ses parents- choisit son camp : résister. Dans « La nuit sans ombre » Alban-Vistel « Richard », signale que l’engagement de la famille Novat date de la fin de l’automne 1940 : il rassemble autour de lui un groupe de jeunes gens dont l’étudiant Georges Novat. Ce sera, écrit-il « son jeune compagnon des premiers jours[1]. »
« Parallèlement, des adultes s’engagent sur l’incertain chemin. Sondaz (…) Arnaud père et fils (…) Novat père, son épouse, admirable patriote dont l’abnégation et le courage évoqueront la haute figure de Cornélia, la mère des Gracques (…). Le groupe s’élargit au long de l’année 1941, recrute d’autres noyaux dans les petites villes et villages voisins[2]. » À l’usine Novat, on se réunit et on critique la politique de Vichy. Jean Novat fait même parvenir à De Gaulle une lettre qui sera lue à Radio-Londres.
En 1942, la résistance se montre car « elle n’avait d’avenir que si elle s’enracinait au cœur du peuple[3]. » Dans de nombreux villes et villages de France, on assiste à des manifestations pour le 1er mai, le 14 juillet ou le 11 novembre. Et puis, poursuit Alban-Vistel, « nous n’étions plus seuls[4]. » Le lien avec l’Angleterre est réalisé et les parachutages commencent. Le premier aura lieu aux abords de Septême, sur le terrain « Villars ». Le message ? « Paul a des jouets pour Tony ». Alban-Vistel envoie Georges, son adjoint « un bel adolescent blond » prévenir les gars : Gaston Roux, Louis Seigle, André Sondaz, rejoints par Auger, Arnaud et d’autres. Ça y est, poursuit Alban-Vistel : on va pouvoir convaincre, instruire les gars et « donner aux groupes francs de quoi se faire la main[5]. »
1943 : la prison pour les Novat
Pour menées antinationales, Jean Novat et son fils totalisent huit mois de prison à la prison Saint-Paul de Lyon et le père neuf mois en tant qu’interné politique à Saint-Sulpice-la-Pointe dans le Vaucluse. On trouve la trace de Georges et de son père en octobre 1943 dans la sous-série 1035 W 16 n° 41 des archives départementales de Lyon qui rassemble les documents produits par les juridictions d’exception lyonnaises pendant la Seconde Guerre mondiale.
Au maquis dans l’Ardèche
Après la prison, Georges prend en main un secteur de l’Ardèche. Le jeune homme qu’on connaît alors sous les pseudonymes de Lenoir, Mollard ou encore Norbert Guillou a vingt-trois ans et pas froid aux yeux.
On peut relater le genre d’opérations menées par Georges Novat. En juillet 1944, par exemple, il intercepte, avec un groupe de dix-sept hommes, un camion G.M.R. ainsi que deux traîtres. La prise est bonne puisque les maquisards saisissent quatre fusils-mitrailleurs, dix mitraillettes et quatre revolvers. Mais son véritable exploit, il le réalise à la gare d’Annonay.
Délivrer soixante-dix déportés : une des pages les plus belles de la Libération
Le 1er août 1944, prison des Baumettes à Marseille : certains prisonniers sont exécutés dans la prison-même, d’autres sont abattus en masse à Signes. Soixante-trois hommes et sept femmes -dont trente Juifs et des résistants-sont également extraits de la prison. Ils sont escortés par une douzaine d’Allemands. Pour eux, direction la déportation, via Drancy.
Le train circule lentement et à Rognac où le train s’est arrêté, les cheminots ont le temps de prévenir la Résistance. Le 3 août, le train arrive à la gare du Theil (Ardèche). Les F.F.I. -peu nombreux avec deux mitraillettes Sten- ne peuvent pas attaquer, pas plus qu’à la gare de Tournon-sur-Rhône. Il faut attendre que le train arrive à Peyraud pour pouvoir enfin agir.
Avec des camarades, Louis Chevalier (« déguisé » en aiguilleur), donne l’ordre au mécanicien de quitter la voie centrale et de se diriger vers Annonay au lieu de Saint-Rambert-d’Albon. C’est dans cette gare que le train des déportés arrive le 4 août.

Attendant de pouvoir attaquer, les résistants sont descendus de Vanosc avec, à leur tête, Georges Novat. Les routes sont obstruées, le tunnel miné.
Des Américains (les « Operational Groups » parachutés dans la région) sont aussi présents : ils détruisent les locomotives avec des bazookas. On fait feu sur les Allemands qui ripostent. Ceux-ci utilisent les prisonniers comme boucliers. Les prisonniers Isaac Schwartz[6], Marius Berenger et Jacques Bernard[7] sont tués. On avertit les Allemands qu’ils sont encerclés et qu’ils doivent se rendre. Mais ceux-ci continuent de riposter jusqu’au dernier assaut qui les neutralise. Dans le train, certains résistants -dont Germaine Pradon- se sont également occupés de leurs gardiens en les neutralisant. Victoire pour les résistants.
Les prisonniers allemands sont conduits dans les rues d’Annonay. Sur la ville flotte le drapeau tricolore avec une inscription : « Ici commence la France libre ».
Ainsi s’est écrit, dira le commissaire de la République Yves Farge, « une des pages les plus belles de la Libération. » C’est peu dire. « Le train des Baumettes » a été le seul train de déportés attaqué par la Résistance.

La lutte continue
Dans le train se trouvait Franz Neumann, jeune poète autrichien juif. « La vie, après avoir touché la mort, commence ce matin à Annonay. Maintenant, je m’en vais vers la montagne », écrit-il à Jeanne son épouse. En effet, comme de nombreux rescapés du « train des Baumettes », Franz rejoint le maquis. Il devient interprète auprès de Georges Novat. Celui-ci lui fait écouter les communications ennemies et donner de faux ordres aux garnisons de la région. Le 22 août, Neumann communique avec la Gestapo de Lyon les enjoignant de préparer leur départ, d’évacuer le personnel inutile et d’éviter les actions dans la ville[8].
La famille Novat après la guerre
Jean Novat est élu conseiller municipal de Vienne, conseiller général. « Ses concitoyens le portent aussi aux deux Assemblées nationales constituantes, et enfin au Conseil de la République où, tête de liste MRP, il fut élu le 8 décembre 1946[9]. »
Son épouse Rose est médaillée de la résistance, comme son fils. Elle décède en 1961. Quant à Georges, il s’engage dans l’Armée française.
[1] Alban-Vistel. La nuit sans ombre. Histoire des mouvements unis de résistance, leur rôle dans la libération du Sud-Est. Paris : Fayard, 1970, 637 p., p. 526. Pour en savoir plus sur Alban-Vistel : https://www.ordredelaliberation.fr/fr/compagnons/alban-vistel
[2] Idem., p. 40.
[3] Ibidem., p. 111.
[4] Ibid., pp. 116-117.
[5] Ibid., pp. 117-120.
[6] Comptable à Toulon.
[7] Notaire à Villes-sur-Auzon.
[8] Beynac Jacques. L’amie inconnue de Jean Moulin, Jeanne Boullen. Paris : Grasset, 2011, 141 p. Après la guerre, Franz Neumann émigrera en Israël avec son épouse et leurs deux fils. Jeanne Boullen avait connu Jean Moulin à Chartres et avait travaillé avec lui jusqu’à son arrestation à Caluire. « L’archivore » Jacques Beynac a consacré à cette femme de l’ombre une biographie passionnante.
[9] http://www2.assemblee-nationale.fr/sycomore/fiche/(num_dept)/5584