Iseau et Hisaud

Le numéro 17 des « Mots de la résistance » était passé à la trappe !

Et après le 15 février 1944 ?

La Zim est arrêtée le 15 février 1944. Entre Cluny et Avignon, il faut continuer à s’organiser et c’est Marie-Louise Clément qui prend le relais, sans connaître Sophie. À Cluny, écrit Marie-Louise à Sophie 14 jours après la « rafle », les choses se sont calmées : « Ici de temps en temps il y a encore de l’imprévu mais rien de comparable avec le passé. » 

Les deux femmes rassurent La Zim internée à Romainville :  

Lettre collective à La Zim, 19 mars 1944. « Avignon continuera à recevoir ravitaillement. Me Ste Marie n’oublie pas promesse. » (Me Ste Marie est peut-être le pseudo de M-L. Clément).

La Zim, à mots couverts, donne des indications sur ce qu’il faut évacuer : l’encaustique (argent) à la cave, par exemple. Peut-être donne-t-elle aussi d’autres indications de « caches » : « Voulez-vous prier Mme Ste-Marie de brosser de temps en temps les vêtements qui sont restés dans l’armoire et dans le grand placard de l’escalier- ainsi que le renard s’il est encore sur la pile de draps dans l’armoire. Vous trouverez chez moi pommes dans la mansarde-boîtes de conserves à la cave, petits pois dans le placard de l’escalier.« 

Dans la lettre collective envoyée à Romainville, on la tranquillise : « Avons en particulier enlevé de ta desserte les denrées périssables risquant de tacher nappes. » 

Tout objet compromettant a donc été évacué de sa maison rue de La Barre.

Maison de La Zim, vue sur l’abbaye.

Sophie poursuit ses activités à Avignon et elle écrit à sa soeur le 19 mars : « Travail absorbant lucratif. Gilles est venu Allier début mars. Rien de neuf sur Mireille. Moser bon moral attend nouvelles. Pépé et famille navrés, confiants, épatants. (…) Montferret t’embrasse pour tous.« 

On retrouve notre « Gilles » dont La Zim annonçait la visite à Avignon dans sa lettre du 10 février 1944. Quant à « pépé », il y a bien longtemps que les filles Zimberlin ont perdu leurs grands-parents. Alors, « Pépé » est-il un personnage important du réseau ?

Hisaud à Grenoble = Moretti

Il semble qu’il y ait eu un problème à Grenoble entre février et mars. C’est là que résident E. Rossel (professeure et amie des soeurs Zimberlin) « Le Roquet » dont nous avons déjà parlé et Jean Moretti (« Hisaud », ancien collègue de La Zim jusqu’en 1937) : « Je pense à vous, j’espère que les grippés vont mieux » écrit La Zim, 10 mars 1944. Ce à quoi Sophie répond : « Le Grenoblois en bonne santé se soigne pour toi » puis plus tard :  « Eté fin février chez Hisaud, tout bien chez lui, réception chaleureuse inoubliable Grippes guéries.« 

L’alerte sur Grenoble est donc passée et La Zim sûrement rassurée par les nouvelles réconfortantes qu’elle reçoit pour Moretti « son petit collègue » comme elle l’appelait à La Prat’s. Mais le 23 mars, M-L. Clément écrit à Sophie : « Juste un mot pour vous dire de ne rien attendre de Grenoble pour la réponse. » 

Malgré nos recherches, nous n’avons rien trouvé sur l’implication de Rossel et Moretti à Grenoble.

Sophie = « Henriette » ou « Robert » à Avignon

Puis le 30 mars à Avignon, c’est Sophie qui ne se sent plus en sécurité peut-être par suite de ce qui s’est passé à Grenoble. En effet, elle signe son courrier à M-L. Clément « Mimi » puis elle lui écrit que « Henriette » s’absente du 5 au 15 avril et qu’il faut que le courrier arrive à Avignon au nom de « Robert Redelsperger 3 rue de l’Agneau » qui la remplacera pour Pâques pendant son congé.  « Henriette » est sûrement le pseudo de Sophie et le n°3 correspond bien à l’adresse de son magasin mais qui est Robert Redelsperger ???

Le 31 mars, M-L. Clément lui répond : « J’espère aussi que malgré votre gros ennui et vos soucis, vous gardez votre bonne santé et que ni votre maman, ni votre tante ne sont trop fatiguées.« 

Jusqu’au 5 mai 1944, M-L. Clément écrira donc à « Robert » qui doit être le nouveau pseudo de Sophie.

La correspondance entre Sophie et M-L. Clément s’arrête là. La ville d’Avignon est bombardée le 27 mai 1944 ; la maison de Lopy a été quelque peu endommagée. Puis c’est le débarquement en Provence en août 1944. Et l’attente commence pour Sophie jusqu’en avril 1945, lorsqu’elle retrouvera pour quelques instants sa sœur à Annemasse avant son décès.