Cluny, La Prat’s- Naissance et fin des traditions.

Jusqu’au milieu du XXe siècle, les Prat’siens conservent des traditions semblables à celles pratiquées aux Arts et Métiers. Le compas et l’équerre ornent longtemps l’uniforme porté, les chansons sont les mêmes.

Chansons et vocab’s

La Prat’s, dira Jean Bernardin « C’était l’antichambre des Arts. Nous avions les mêmes professeurs, les mêmes traditions. Tous les matins, une grande gueule chantait l’Ex. Les chansons des monômes étaient les mêmes…». Car on forme monôme notamment au moment de chaque décale, de chaque départ en vacances. Et l’on chante :

« Pour fabriquer de l’hydrogène, On prend un tube de porcelaine. On met du fer et puis de l’eau, On chauffe le tout sur un fourneau. Ex – Ex – Ex. »

Seule la K’storienne devient une chanson spécifique à La Prat’s, son hymne, créé dans les années 1940 – 1945. Le premier matin du concours d’entrée au Tabagn’s (École des Arts-et-Métiers de Cluny), « Nous descendions en rangs en chantant la K’storienne. C’était censé impressionner les autres candidats ! » (Jean Morineau)

Les vacances approchent… EX=0. Et la question : EX.ex = combien ? Il n’était pas question de se dire bonjour. Le bonjour d’un ancien à un conscrit se traduisait toujours par : EX = combien ? (grand Ex) et il fallait que le jeune sache répondre combien il restait de jours avant la fin de l’année. ex = combien ? (petit Ex) et il fallait que le conscrit sache répondre à l’ancien combien il restait de jours jusqu’à la prochaine décale (petites vacances). Il fallait donc avoir, dès son entrée à La Prat’s, un calendrier en mémoire pour répondre exactement à la question de EX.ex.

Les élèves des deux écoles parlent la même langue (on demande à un conscrit sa « définition »), l’apostrophe est de mise : on arpente le Fouett’s, on boit du zaol’s (café) on usine le plat’s (arpente le plateau). « Une partie de l’argot était celui des lycées et pensionnats en général, d’autres termes venaient du jargon traditionnel des ateliers […] Cet argot était fait d’un vocabulaire constamment enrichi et de métaphores syntaxiques. Pour beaucoup de mots composés ou expressions, le premier terme était supprimé et remplacé par un Z. S’y ajoutait un goût pour l’abréviation des termes. » (Les Écoles des Arts et Métiers de Charles D. Day)

L’enterrement du K’stor.

Et puis vient le moment du concours, le moment d’enterrer symboliquement sa scolarité Prat’sienne. Dès les années 1900, P. Dameron raconte comment se font les réunions de promotions chaque année vers l’époque des examens.

« Telle l’Académie Française, ils tenaient une séance oratoire. Le rite ? Deux veilleurs au moment où le surveillant était endormi, réveillaient leurs camarades. Sortie silencieuse des dortoirs, éclairage très atténué dans l’amphithéâtre, une bougie dans un coin. » 

Cette tradition (imitée des Arts ? n’enterre-t-on pas encore le Num’s 3 en le jetant dans la Grosne ?) perdurera jusque dans les années cinquante. En cinquième année, quand la date des concours approche, les élèves « enterrent » l’année. Au dortoir, la nuit précédant la fête, une veillée funèbre est organisée autour du K’stor (mannequin fait de paille et de chiffons). Le jour de l’enterrement, les élèves se déguisent et accompagnent K’stor et sa veuve. Après avoir arpenté la campagne environnante, ils procèdent aux obsèques en faisant brûler ou exploser le mannequin dans les grottes de Blanot ou d’Azé.

Ne reste que la veuve K’stor, éplorée, qui attend de retrouver une nouvelle promotion et un nouveau K’stor. L’enterrement symbolique du K’stor va de pair avec la rédaction d’un « Persan » (ou « Père Cent » ou « Per Cent »), créé à partir des années 1930. Cent jours avant la fin de la scolarité (EX = 100), la promotion édite son Persan, simple feuillet ou petit livret à haute valeur symbolique, reflet de quelques années passées à La Prat’s. Il renferme notamment l’annuaire des élèves de la promotion, quelques couplets sur les professeurs et autres symboles hauts en couleur.

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